Par un arrêt rendu le 2 février 2022, la Cour d’appel de Paris a considéré qu’en cas de défaut de remise au locataire d’un état des risques naturels et technologiques daté de moins de six mois lors de la conclusion du bail commercial, le preneur est en droit de poursuivre la résolution du bail « sans avoir à justifier d’un quelconque préjudice ».
Dans cette affaire, le bailleur a demandé la condamnation du locataire à lui verser les loyers et charges impayés à compter de la date de prise d’effet du bail commercial. Le preneur a sollicité la résolution du bail aux motifs notamment que le bailleur aurait manqué à son devoir légal d’information en n’annexant pas au bail un état des risques naturels et technologiques établi moins de six mois avant la date de conclusion du bail.
Pour mémoire, l’obligation du bailleur de remettre au preneur un état des risques naturels et technologiques s’applique aux baux commerciaux mentionnés par les articles L. 145-1 et L. 145-2 du Code de commerce (art. L 125-5, II-al. 2 du Code de l’environnement). Il doit être annexé au bail commercial (art. L 125-5, II-al. 2 du Code de l’environnement) et établi moins de six mois avant la date de conclusion dudit bail (art. R 125-26, al. 3 du Code de l’environnement). A défaut, le preneur « peut poursuivre la résolution du contrat ou demander au juge une diminution du prix » (art. L 125-5, V du Code de l’environnement).
La Cour d’appel de Paris par sa décision en date du 2 février 2022 a prononcé la résolution du bail commercial « aux torts du bailleur » en considérant que le preneur est en droit de poursuivre la résolution du bail « sans avoir à justifier d’un quelconque préjudice » , après avoir relevé que :
– « la communication d’un état des risques naturels et technologiques daté de moins de 6 mois constitue une obligation légale d’information à la charge du bailleur. » ;
– en l’espèce, « il n’est pas contesté que seul un état des risques naturels et technologiques daté du 2 octobre 2009 a été communiqué par le bailleur au preneur, ancien de plus de six mois avant la conclusion du bail. »
La Cour d’appel de Paris en tire les conséquences suivantes : « la résolution a pour effet d’anéantir le [ bail] ab initio de sorte que les loyers demandés ne sont pas dus et le dépôt de garantie doit être remboursé ».
La décision de la Cour d’appel de Paris statuant sur renvoi se distingue de celle de la Cour de cassation qui avait pour sa part considéré que le manquement imputé au bailleur consistant en l’absence de remise de cet état des risques de moins de 6 mois doit être d’une « gravité suffisante (…) pour justifier la résiliation du bail » (Cass. Com. 10 septembre 2020 n°19-13.760).
Si cette décision de la Cour d’appel de Paris s’inscrit dans la continuité d’autres décisions des juges du fond (CA, Colmar, 15 Juin 2020 n°18/01053, CA de Versailles, 15-01-2019, n°16/07715), certains juges du fond ont adopté une position contraire, en retenant qu’il ne suffit pas au preneur d’invoquer l’absence d’état des risques naturels et technologiques pour obtenir automatiquement la résolution du bail : le preneur doit au préalable démontrer un préjudice subi en raison du manquement du bailleur (CA Toulouse, 17-3-2021, n°18/04865 ; CA Nîmes 24-5-2012 n°11/02158).
CA de Paris, 2 février 2022, n° 20/14673