Par un arrêt en date du 15 février 2023, la Cour de cassation a jugé que la vente d’un actif immobilier dépendant d’une liquidation judiciaire est une vente faite d’autorité de justice et ne résulte pas d’une décision du bailleur, de sorte que le droit de préemption prévu par l’article L.145-46-1 du Code de commerce n’est pas applicable.
En l’espèce, une société propriétaire de plusieurs actifs immobiliers a été placée en liquidation judiciaire en 2005. Le juge-commissaire a autorisé le liquidateur à vendre l’un de ces actifs à un acquéreur. L’acte authentique de vente a été signé en avril 2018.
Un tiers a assigné le liquidateur et l’acquéreur aux fins d’être substitué audit acquéreur au titre de la violation du droit de préemption prévu par l’article L.145-46-1 du Code de commerce en se prévalant de l’existence d’un bail commercial portant sur des locaux compris dans un ensemble immobilier, consenti en 2007 par le gérant de la société bailleresse placée en liquidation judiciaire, et d’une offre d’achat précédemment adressée au liquidateur pour un prix supérieur à celui convenu dans l’acte authentique de vente.
Les juges du fond ont rejeté la demande du preneur, au motif qu’un contrat de bail conclu sur le bien d’une société après la date d’ouverture de la procédure de liquidation judiciaire à son encontre est nul, de sorte que le preneur ne pouvait se prévaloir d’un quelconque droit de préemption en l’absence de titre sur les locaux.
Le preneur s’est pourvu en cassation en prétendant que la prise à bail de locaux propriété d’une société liquidée après la date d’ouverture de la procédure n’est pas nulle mais simplement inopposable aux organes de la liquidation et qu’il pouvait par conséquent efficacement opposer, non pas aux organes de la liquidation, mais au bailleur et à son acquéreur, l’existence d’un bail commercial et du droit de préemption prévu par l’article L.145-46-1 du Code de commerce.
La Cour de cassation a rejeté la demande du preneur en rappelant une position de principe déjà affirmée par le passé (voir notamment Cour de cassation, 3eme chambre civile, 23 mars 2022, n°20-19.174) : la vente de gré à gré d’un actif immobilier dépendant d’une liquidation judiciaire est une vente faite d’autorité de justice, de sorte que les conditions d’application du droit de préemption du preneur prévu par l’article L.145-46-1 du Code de commerce – applicable dans le seul cas où le propriétaire envisage la vente des locaux loués – ne sont pas réunies. Autrement dit, dans de telles circonstances, le bailleur n’envisage pas et ne décide pas de vendre les locaux loués : il y est contraint par la mise en œuvre de la procédure collective dont il fait l’objet, ce qui exclue l’application du droit de préemption « Pinel ».