Par deux arrêts rendus le 23 novembre 2022, la Cour de cassation a réaffirmé la position qu’elle avait adoptée dans ses arrêts du 30 juin 2022 [1], selon laquelle les loyers commerciaux restent dus par le preneur, même en cas de fermeture des locaux pendant la période de confinement.
En l’espèce, les deux décisions concernent des baux commerciaux portant sur des locaux situés dans des résidences de tourisme. En raison des mesures relatives à la lutte contre la propagation du Covid-19, les preneurs-exploitants avaient dû cesser leur activité dans ces résidences du 14 mars au 2 juin 2020 et avaient arrêté de payer leurs loyers et leurs charges pendant cette période en invoquant l’exception d’inexécution, la perte partielle de la chose louée ou encore l’application des clauses de suspension du loyer prévues dans les baux en cas de circonstances exceptionnelles affectant la chose louée.
Les bailleurs ont alors assigné lesdits preneurs en paiement de provisions correspondant à l’arriéré locatif et le juge des référés leur a, dans les deux cas, accordé la provision demandée au motif que l’obligation de payer n’était « pas sérieusement contestable ».
Dans les deux arrêts susvisés, la Cour de cassation rejette les pourvois des preneurs-exploitants , après avoir relevé que les clauses de suspension du loyer prévues dans les baux ne pouvaient recevoir application que dans les cas où le bien était indisponible par le fait ou la faute du bailleur, ou en raison d’un désordre ou d’une circonstance exceptionnelle affectant le bien loué.
Dans le premier arrêt (pourvoi n° 22-12.753), la Haute juridiction considère, pour motiver sa décision, que « la locataire ne caractérisait pas en quoi les mesures prises pendant la crise sanitaire constituaient une circonstance affectant le bien » et, dès lors, que « l’obligation de payer le loyer n’était pas sérieusement contestable ».
Dans le second arrêt (pourvoi n° 21-21.867), elle affirme que « l’effet de la mesure gouvernementale d’interdiction de recevoir du public, générale et temporaire et sans lien direct avec la destination contractuelle du local loué, ne peut être, d’une part, imputable aux bailleurs, de sorte qu’il ne peut leur être reproché un manquement à leur obligation de délivrance, d’autre part, assimilé à la perte de la chose, au sens de l’article 1722 du Code civil ».
La Cour de cassation relève par ailleurs que les locaux loués n’ont subi aucun changement et approuve la Cour d’appel compétente en considérant que celle-ci a retenu, à bon droit, que « les mesures d’interdiction d’exploitation, qui ne sont ni du fait ni de la faute du bailleur, ne constituent pas une circonstance affectant le bien, emportant perte de la chose louée » et avait donc pu déduire que « l’obligation de payer le loyer n’était pas sérieusement contestable ».
Cass. 3e civ., 23 nov. 2022, n° 22-12.753
Cass. 3e civ., 23 nov. 2022, n° 21-21.867
[1] Cass. Civ 3, 30 juin 2022, n°21-20.127, Cass. Civ. 3, 30 juin 2022, n°21-20.190.