La cristallisation des règles d’urbanisme bénéficie à tous les lots de lotissement, même ceux qui n’ont pas fait l’objet d’un transfert en propriété ou en jouissance.
L’article L. 442-14 du Code de l’urbanisme prévoit un mécanisme de cristallisation des règles d’urbanisme, pour une durée de cinq ans, en matière de lotissement.
Le point de départ de ce délai diffère selon que le lotissement résulte d’un permis d’aménager ou d’une déclaration préalable.
Pour ce qui concerne le lotissement faisant l’objet d’une déclaration préalable, le texte prévoit que :
« Lorsque le lotissement a fait l’objet d’une déclaration préalable, le permis de construire ne peut être refusé ou assorti de prescriptions spéciales sur le fondement de dispositions d’urbanisme nouvelles intervenues depuis la date de non-opposition à la déclaration préalable, et ce pendant cinq ans à compter de cette même date. »
La cristallisation des règles d’urbanisme en matière de lotissement est plus avantageuse que celle résultant d’un certificat d’urbanisme puisque, en plus de porter sur une durée plus longue (5 ans au lieu de 18 mois), elle ne peut être contrecarrée par une décision de sursis à statuer.
Le Conseil d’Etat a en effet jugé que :
« Il résulte de l’article L. 442-14 du code de l’urbanisme que l’autorité compétente ne peut légalement surseoir à statuer, sur le fondement de l’article L. 424-1 du même code, sur une demande de permis de construire présentée dans les cinq ans suivant une décision de non-opposition à la déclaration préalable de lotissement au motif que la réalisation du projet de construction serait de nature à compromettre ou à rendre plus onéreuse l’exécution du futur plan local d’urbanisme. » (CE, 31 janv. 2022, n°449496)
Par ailleurs, l’article L. 442-14 du Code de l’urbanisme prévoit, depuis la loi Elan, que l’annulation d’un PLU sur le fondement duquel l’autorisation de lotir est délivrée ne remet pas en cause la cristallisation des règles d’urbanisme édictées par ce PLU (à condition néanmoins que le PLU soit annulé pour un motif étranger à ces règles).
La Conseil d’Etat a également jugé que :
« la société […], qui entendait conserver la propriété de l’ensemble de la parcelle dont elle avait préalablement déclaré la division et sollicitait le permis litigieux pour son propre compte, en vue de la location saisonnière de la construction projetée, n’avait, à la date du permis de construire, pas procédé à la cession dont aurait résulté la division. Dès lors, en l’absence de tout transfert de propriété ou de jouissance, elle ne pouvait se prévaloir, à l’occasion de cette demande de permis de construire, des droits attachés, en vertu de l’article L. 442-14 du Code de l’urbanisme cité ci-dessus, au lotissement autorisé, dont le projet de construction ne pouvait relever. » (CE, 13 juin 2022, n°452457)
Ainsi, pour que le pétitionnaire puisse se prévaloir de la cristallisation des règles d’urbanisme, encore faut-il que la division du terrain soit effective, ce qui suppose un transfert en propriété ou en jouissance. Le lotisseur ne peut donc bénéficier d’une cristallisation des règles d’urbanisme tant qu’il n’a pas cédé un lot.
Dans son arrêt du 18 octobre 2014, le Conseil d’Etat complète sa jurisprudence en jugeant que dès lors qu’un premier lot est détaché par l’effet d’un transfert en propriété ou en jouissance, c’est bien l’ensemble des lots compris dans le périmètre du lotissement qui bénéficient de la cristallisation des règles d’urbanisme.
En l’espèce, une société agissant pour le compte de propriétaires indivis avait déposé une déclaration préalable de division en 4 lots (A, B, C, D) et avait obtenu une décision de non-opposition tacite, devenue définitive. Mais seuls les lots A, C et D avaient été cédés.
A la question de savoir si le lot B pouvait bénéficier de la cristallisation des règles d’urbanisme, le Conseil d’Etat a répondu que « la cession des trois autres lots suffisait à caractériser la mise en œuvre des opérations de lotissement. Par suite, c’est sans erreur de droit que le tribunal administratif a jugé que la société pétitionnaire pouvait se prévaloir, à l’occasion de sa demande de permis de construire, des droits attachés, en vertu de l’article L. 442-14 du code de l’urbanisme (…), au lotissement autorisé, dont relève le projet de construction ».
Autrement dit, les lots conservés par le lotisseur bénéficient de la cristallisation des règles d’urbanisme dès lors qu’au moins un autre lot a été cédé.