La Cour de cassation a affirmé que l’exclusion des ventes des locaux loués par adjudication du champ d’application du droit de préemption prévu par l’article L. 145-46-1 du Code de commerce (dit « droit de préemption Pinel ») ne saurait porter atteinte au principe d’égalité et à la liberté d’entreprendre du preneur commercial
Par un arrêt rendu le 15 décembre 2022, la Cour de cassation, statuant à la suite de la transmission d’une question prioritaire de constitutionnalité (QPC) a considéré que l’exclusion du droit de préemption du preneur à bail commercial prévu par l’article L. 145-46-1 du Code de commerce en cas de vente des locaux loués par adjudication ne saurait porter atteinte au principe d’égalité et à la liberté d’entreprendre du locataire.
Pour mémoire, la Cour de cassation avait déjà pu expressément affirmer que le droit de préemption Pinel n’est pas applicable à la vente d’un bien par adjudication, s’agissant là d’une vente faite d’autorité de justice (Cass. 3ème civ., 17 mai 2018, n° 17-16.113 ; Cass. com., 23 mars 2022, n° 20-19.174).
Au cas d’espèce, le preneur reprochait notamment à la Cour d’appel de Versailles d’avoir fait application de l’arrêt susvisé, en refusant de le reconnaitre propriétaire du local qu’il occupait au titre d’un bail commercial malgré l’exercice de son droit de « préemption » pour acquérir ledit local, au motif que celui-ci avait fait l’objet, quelques jours avant la déclaration d’exercice dudit droit, d’un jugement d’adjudication au profit d’une société civile immobilière tierce.
Parallèlement à son pourvoi, le preneur avait demandé à la Cour de cassation de renvoyer au Conseil constitutionnel une QPC portant sur la conformité de l’article L. 145-46-1 du Code de commerce avec la liberté d’entreprendre et le principe d’égalité, en ce qu’il prévoit d’accorder au locataire un droit de préemption seulement dans le cas où le propriétaire envisage de vendre le local, et non en cas de vente forcée dudit local par adjudication.
Procédant à l’examen de la QPC, la Cour de cassation a tout d’abord considéré que le grief lié au principe d’égalité ne saurait présenter un caractère sérieux dès lors que « le cas où le propriétaire d’un local commercial ou artisanal envisage de le vendre se distingue de celui de la vente par adjudication ». La différence de traitement entre ces deux opérations « repose donc sur une différence de situation » selon la Haute Juridiction.
La Cour de cassation a en outre jugé que l’atteinte à la liberté d’entreprendre ne présente pas plus de caractère sérieux, dans la mesure où ladite liberté « n’implique aucun droit d’acquérir le bien loué », et qu’au surplus, « le locataire peut, comme toute personne, se porter enchérisseur s’il justifie de garanties de paiement ».
En conséquence, la Cour de cassation a considéré qu’il n’y a pas lieu de renvoyer la QPC à l’examen du Conseil constitutionnel.
Cass. , 3e Civ., 15 décembre 2022, n° 22-17.505