Aux termes d’un arrêt rendu le 21 avril 2022, la Cour de cassation a rappelé que les « grosses réparations » prévues par l’article 606 du Code civil s’entendent de celles qui intéressent « l’immeuble dans sa structure et sa solidité générale » tandis que les réparations d’entretien « sont celles utiles au maintien permanent en bon état de l’immeuble ».
Dans cette affaire, le bail commercial prévoyait que le preneur :
- entretiendra les lieux loués en bon état de réparations locatives ; et
- ne pourra exiger du bailleur (…) aucune mise en état ni aucune réparation sauf les réparations prévues par l’article 606 du Code civil.
Le preneur a demandé au bailleur le paiement des travaux de remplacement des fenêtres en considérant qu’il s’agissait de grosses réparations prévues par l’article 606 du Code civil dont le coût incombait au bailleur aux termes du bail, ce que le bailleur a contesté.
Pour mémoire, l’article 606 du Code civil prévoit que les grosses réparations « sont celles des gros murs et des voûtes, le rétablissement des poutres et des couvertures entières » ; « celui des digues et des murs de soutènement et de clôture aussi en entier » ; « toutes les autres réparations sont d’entretien« .
La Cour de cassation retient que pour être qualifiés de « grosses réparations« , les travaux doivent affecter l’immeuble dans « sa structure » et dans sa « solidité générale », sans être nécessairement expressément visés à l’article 606 du Code civil.
Ce faisant, la Cour de cassation adopte une interprétation extensive de la notion de « grosses réparations » en réaffirmant quasiment « mot pour mot » la position de principe qu’elle avait d’ores et déjà adoptée par une décision rendue le 13 juillet 2005 (Cass. Civ. 13/07/2005 n° 04-13.764) . Ainsi, la Cour de cassation semble donc avoir abandonné définitivement l’interprétation restrictive consistant à considérer que l’énumération des grosses réparations figurant à l’article 606 du Code civil était limitative (Cass. Civ. 25/10/1983 n° 82-11.261 ; Cass. Civ. 27/11/2002 n°01-12.816).
Dans la présente affaire, la Cour d’appel d’Amiens avait, pour sa part, retenu « d’une part, que, lorsqu’une clause du contrat met à la charge du bailleur les grosses réparations édictées par l’article 606 du code civil, [le bailleur] doit supporter toutes les réparations d’entretien utiles au maintien permanent de l’immeuble et non uniquement celles strictement énoncées par l’article précité et, d’autre part, que le remplacement des fenêtres constitue une grosse réparation« .
En statuant ainsi sans avoir relevé que les travaux litigieux « intéressaient l’immeuble dans sa structure et sa solidité générale », la Cour de cassation casse l’arrêt de la Cour d’appel et renvoie aux juges du fond le soin d’apprécier souverainement si les travaux de remplacement de fenêtres peuvent être qualifiés de « grosses réparations » affectant l’immeuble « dans sa structure et sa solidité générale » pour en déduire, le cas échéant, que le coût de ces travaux doit être pris en charge par le bailleur.