Le guide ministériel relatif à l’ « Evolution de la réglementation applicable aux destinations de constructions dans les PLU(i) », dont la publication avait fait l’objet d’une brève le 29 août dans le blog, était attendu de longue date. Il vient mettre à jour la « Fiche technique » publiée en février 2017, qui constituait jusque-là la seule référence de doctrine administrative en la matière, en intégrant les modifications apportées à l’arrêté du 10 novembre 2016.
Pour mémoire :
– Par l’effet d’un décret du 31 janvier 2020 venant scinder l’ancienne sous-destination « hébergement hôtelier et touristique » en deux nouvelles sous-destinations (« hôtels » et « autres hébergements touristiques »), l’arrêté du 10 novembre 2016 a été modifié pour apporter des définitions à chacune des deux nouvelles sous-destinations issues de cette scission. L’opportunité n’a pas été saisie de ranger dans une catégorie les locaux affectés à une activité de location meublée de tourisme. Ce fut chose faite avec la parution en janvier 2022 d’un « Guide pratique de la réglementation des meublés de tourisme à destination des communes », qui a rangé dans la sous-destination « logement » les logements loués moins de 120 jours par an et ne proposant pas de prestations hôtelières au sens du b) du 4° de l’article 261-D du code général des impôts et dans la sous-destination « autres hébergements touristiques » les logements loués plus de 120 jours par an ou proposant de telles prestations hôtelières.
– Par l’effet d’un décret du 22 mars 2023 venant créer deux nouvelles sous-destinations (« lieux de culte » et « cuisine dédiée à la vente en ligne » ou dark kitchen), l’arrêté du 10 novembre 2016 a été modifié pour apporter des définitions à ces deux nouvelles sous-destinations, mais aussi pour ranger les « locaux dans lesquels sont exclusivement retirés par les clients les produits stockés commandés par voie télématique » (drives) dans la sous-destination « artisanat et commerce de détail » et les « points permanents de livraison ou de livraison et de retrait d’achats au détail commandés par voie télématique » (dark stores), ainsi que les « locaux hébergeant les centres de données » (data centers) dans la sous-destination « entrepôt ». La sous-destination « exploitation agricole » a été élargie aux « constructions ou installations nécessaires à la transformation, au conditionnement et à la commercialisation des produits agricoles ». Enfin, une correction a été apportée pour que les bureaux des administrations publiques ne recevant pas ou peu de public ne relèvent plus de la sous-destination « locaux et bureaux accueillant du public des administrations publiques et assimilés » comme auparavant, mais de la sous-destination « bureau ».
Le nouveau guide ministériel tient compte de ces nombreuses évolutions et apporte des éclairages nouveaux.
Tout d’abord, il lève l’ambiguïté que laissait planer l’ancienne fiche en confirmant que « Les éléments fournis dans cette fiche n’ont pas vocation à remplacer les exemples qu’un PLU pourrait comporter dans un lexique ou glossaire, mais à servir de référence en cas de silence du document dans ce domaine ». Même si cela ne faisait que peu de doute auparavant, il est désormais clair que les compléments de définition apportés par les PLU l’emportent sur celles du guide en cas de contradiction. Il confirme également « que tous les renvois vers des législations extérieures ne constituent que des indications dès lors qu’aucun renvoi formel n’est prévu dans la loi, dans les décrets ou arrêtés ». Autrement dit, les renvois opérés par le guide ne font pas échec au principe d’indépendance des législations.
Sur les compléments de définition, un certain nombre d’évolutions peuvent être soulignées :
– La sous-destination « exploitation agricole » inclut les constructions destinées à l’élevage des animaux (et non à leur gardiennage). Il est également tenu compte de l’évolution apportée par la modification de l’arrêté en 2023, puisque le guide indique que « La définition donnée à la sous-destination « exploitation agricole» dans l’arrêté du 22 mars 2023 n’implique pas que les constructions nécessaires à la transformation, au conditionnement et à la commercialisation de produits agricoles qui sont dans le prolongement de l’acte de production, et donc considérées par l’arrêté comme « exploitation agricole», soient forcément « nécessaires aux activités agricoles, pastorales ou forestières » tel que mentionné aux articles L.121-10 et L.122-11 du code de l’urbanisme »
– La sous-destination « logement » se caractérise toujours par tous les statuts d’occupation, au premier rang desquels figure le propriétaire, mais il est précisé désormais que celui-ci peut être occupant aussi bien au titre de résidence principale que secondaire, probablement en écho au guide pratique de la réglementation des meublés de tourisme. A cet égard il est désormais indiqué que cette sous-destination peut recouvrir également les chambres d’hôtes au sens des dispositions du Code de tourisme et les meublés de tourisme dans les conditions prévues par ce guide pratique, mais seulement « dans la mesure où le pétitionnaire le précise dans le dossier de demande d’autorisation ». Le nouveau guide range par ailleurs le coliving dans la sous-destination « logement », sans aucune condition tenant au mode d’exploitation, au type de contrat de location ni à la durée des séjours. Il s’en tient à décrire ce type de locaux comme comprenant des « espaces privatifs (chambre, salle de bain, petite cuisine) et partagés (salon, salle de sport, bibliothèque, spa…) » et ajoute que « Les occupants peuvent bénéficier de services mutualisés (Wifi, ménage, parking…) et payent un loyer comprenant l’assurance habitation ». Il est enfin précisé que, en application de la jurisprudence (CE, 13 déc. 2021, n° 443815), les règles d’urbanisme relatives à la mixité sociale s’applique à la sous-destination « logement » mais pas à la sous-destination « hébergement ».
– La sous-destination « artisanat et commerce de détail » intègre désormais les « locaux dans lesquels sont exclusivement retirés par les clients les produits stockés commandés par voie télématique » en précisant qu’il s’agit de drives « organisés pour l’accès en automobile ou pour l’accès piéton ». Est également ajouté à « l’artisanat avec une activité commerciale de vente de biens », figurant déjà dans l’ancienne version, « l’artisanat sans activité commerciale de vente de biens (locaux de fabrication de produits alimentaires, de textile, de meubles, de produits automobiles, etc.) ».
– La sous-destination « restauration » fait l’objet d’une définition pour mieux exclure les dark kitchen. Il s’agit de « restaurants « traditionnels » dans lesquels les clients s’attablent pour manger mais également les restaurants qui pratiquent partiellement ou exclusivement la vente à emporter ».
– La sous-destination « autres hébergements touristiques » vise désormais les « meublés de tourisme dans les conditions prévues dans le guide pratique de la réglementation des meublés de tourisme ». Il y est également précisé que toutes les résidences de vacances relèvent de cette sous-destination, y compris lorsque leur exploitation n’a pas de caractère commercial.
– La sous-destination « locaux et bureaux accueillant du public des administrations publiques et assimilés » intègre le critère de caractère « substantiel » de l’accueil du public et précise que ce dernier « n’est pas quantifié (il n’est pas nécessaire que plus de 50 % de la surface de plancher du bâtiment soit dédié à l’accueil du public) mais estimé au regard des missions de service public qui y sont exercées ».
– La sous-destination « lieux de culte » est intégrée sans faire l’objet de complément de définition si ce n’est qu’il est indiqué que sa création facilitera la procédure mise en œuvre pour l’application des dispositions de l’article L. 422-5-1 du Code de l’urbanisme instaurant la consultation préalable du représentant de l’Etat dans le département pour tout projet portant sur des constructions et installations destinées à l’exercice d’un culte.
– La sous-destination « industrie » intègre l’ajout dans l’arrêté en 2023 des « constructions relevant de l’activité extractive du secteur primaire » en précisant qu’il s’agit des « activités dont la finalité consiste en une exploitation des ressources naturelles (notamment les exploitations minières, et gisements) ».
– La sous-destination « entrepôt » intègre l’ajout dans l’arrêté en 2023 des « locaux logistiques dédiés à la vente en ligne ainsi que les points permanents de livraison ou de livraison et de retrait d’achats au détail commandés par voie télématique » en précisant qu’il s’agit de « locaux dédiés au stockage de produits commandés en ligne et livrés au client tels que les « dark stores », qu’ils disposent ou non d’un point de retrait des marchandises. ». Il est ajouté que les « équipements de logistique urbaine de proximité » entrent également dans cette sous-destination, ces locaux étant définis comme ceux « affectés à des activités de service logistique liées à la livraison finale et à la réexpédition des marchandises, pouvant inclure du stockage de courte durée et le retrait par le destinataire, à l’exclusion de tout service commercial incluant la préparation des commandes destinées à un client final ».
– La sous-destination « bureau » intègre désormais expressément les « constructions des administrations dont l’accueil du public est limité » conformément à la réécriture de l’arrêté du ce point.
– La sous-destination « cuisine dédiée à la vente en ligne » est désignée comme les locaux de type dark kitchen « qui ne prévoient pas la possibilité d’accueillir une clientèle pour se restaurer sur place ».
Le guide reproduit par ailleurs les définitions figurant dans le lexique national de l’urbanisme pour ce qui concerne d’une part la notion de « locaux accessoires » (étant rappelé que l’article R. 151-29 du Code de l’urbanisme prévoit que « Les locaux accessoires sont réputés avoir la même destination et sous-destination que le local principal ») et d’autre part la notion de « construction » (étant précisé que les destinations ne réglementent que les constructions et non les installations).
Il explicite également les dispositions spéciales en matière d’articulation entre les autorisations d’urbanisme et celles relevant du Code de tourisme ainsi que le cas particulier des changements de destination en zone agricole