Par une ordonnance de référé en date du 20 septembre 2021, la cour administrative d’appel (CAA) de Paris a suspendu l’exécution de l’arrêté de permis de construire accordé pour la construction du centre nautique d’entraînement des athlètes en vue des Jeux olympiques et paralympiques de Paris (JOP) de 2024, à Aubervilliers (Seine-Saint-Denis).
Plusieurs associations et particuliers ont saisi le juge administratif des référés pour demander la suspension de l’exécution du permis de construire du 21 juillet 2021, par lequel le maire d’Aubervilliers a autorisé la construction d’un centre nautique et d’un espace de restauration, sur un terrain accueillant une gare de bus, un parking et des jardins familiaux faisant l’objet de conventions d’occupation précaire (les jardins des Vertus).
Le juge des référés de la CAA de Paris confirme d’abord sa compétence, qu’il tient de l’article R. 311-2-5° du CJA au motif que l’équipement litigieux figure sur la liste des ouvrages destinés à l’entraînement des athlètes en vue des JOP 2024, et est donc « nécessaire à la préparation, à l’organisation ou au déroulement des jeux Olympiques et Paralympiques de 2024 ».
Il juge ensuite irrecevables les conclusions de l’association Mouvement national de lutte pour l’environnement–93 et Nord Est, faute d’avoir publié ses statuts en vigueur et de produire des statuts antérieurs. Il admet en revanche l’intérêt à agir de trois requérants membres de la Société des jardins ouvriers des Vertus, exploitant des parcelles à proximité immédiate du projet, lequel va entraîner l’artificialisation des sols sur une surface de 40 000 m² et ainsi affecter directement les conditions d’utilisation et de jouissance desdites parcelles.
Le juge rappelle en outre que la présomption d’urgence d’une demande de suspension d’un permis de construire ne peut être renversée que lorsqu’il existe un intérêt public d’une nature telle qu’il justifie l’exécution sans délai du permis de construire.
Il considère qu’en l’espèce, la condition d’urgence est bien remplie.
En effet, à l’argument de la commune d’Aubervilliers tiré de l’urgence à poursuivre les travaux autorisés, compte tenu de l’importance de la réalisation en temps utile des équipements liés aux JOP 2024, le juge des référés, reprenant un raisonnement identique à celui retenu dans l’ordonnance du 6 avril 2021 (n° 21PA00910 portant sur la suspension partielle de l’autorisation environnementale du « cluster des médias » des JOP 2024), répond qu’il aurait suffi à la commune d’intégrer en amont, dans son calendrier de travaux, la possibilité de recours juridictionnels contre le permis de construire.
Il ne retient pas non plus l’argument avancé en défense, relatif à la carence du département en matière d’équipements nautiques et au risque corrélatif de noyades qui en résulterait – au demeurant non démontré.
Le juge des référés considère enfin que plusieurs moyens sont de nature à faire naître des doutes sérieux sur la légalité du permis contesté :
- – le maire de la commune d’Aubervilliers n’était pas habilité à présenter la demande de permis de construire au nom de la commune puisque le montant du projet excède celui de la délégation consentie par conseil municipal en vue de déposer des demandes d’autorisations d’urbanisme au nom de la commune ;
- – eu égard à l’indépendance fonctionnelle envisagée pour l’espace de restauration, son activité – à la supposer même « liée » au fonctionnement du centre nautique par sa localisation au R+1 – ne saurait être regardée comme « nécessaire » audit fonctionnement, et méconnaît par conséquent les dispositions de l’article 1.2 du règlement du PLUi applicable au secteur concerné, n’autorisant les constructions à destination de restauration des activités de services où s’effectue l’accueil d’une clientèle qu’à la condition que ces activités soient liées et nécessaires au fonctionnement de l’équipement ;
- – la réalisation du projet, conduisant à abattre 67 arbres, méconnaît les dispositions de l’article 3.2.3 du règlement du PLUi imposant qu’un nombre équivalent d’arbres supprimés soit replanté sur le terrain, dès lors que seules 47 plantations sont prévues dans la demande de permis de construire.
Le juge des référés prononce la suspension de l’exécution de l’arrêté de permis de construire, et enjoint au maire d’Aubervilliers de prendre toutes mesures utiles afin que les travaux entrepris pour l’édification de l’ouvrage concerné cessent sans délai, sur le fondement de l’article L. 911-1 du CJA.
CAA Paris, 20 septembre 2021, n° 21PA04871