En droit immobilier, l’actualité de ces dernières semaines fut riche à plusieurs égards.
Sur le plan transactionnel, la Cour de cassation a rendu un arrêt intéressant dans un cas où une lettre d’intention émise par un candidat acquéreur prévoyait qu’en cas d’acceptation de l’offre par le vendeur, un acte sous seing privé serait établi pour préciser toutes les modalités de la vente et l’ensemble des conditions suspensives particulières. La Haute Juridiction a jugé que l’acceptation de cette offre par le vendeur, imprécise, ne valait pas vente parfaite et relevait simplement de pourparlers contractuels. On retiendra aussi un autre arrêt récent, par lequel la Cour de cassation a confirmé que le droit de préférence « Pinel » n’est pas applicable en cas de vente de locaux à usage industriel, même si le preneur y exerce à titre accessoire une activité de négoce.
Concernant la pratique du bail commercial, la Haute juridiction a, à nouveau, précisé les règles applicables en matière de prescription, en confirmant notamment que le bailleur peut invoquer le défaut d’immatriculation au registre du commerce et des sociétés du preneur d’un bail commercial à la date d’effet du congé ou de la demande en renouvellement pendant toute la durée de la procédure en fixation du loyer du bail renouvelé ou en paiement d’une indemnité d’éviction. Elle a aussi changé de position, en considérant qu’en présence d’une succession de contrats, l’action en requalification desdits contrats en bail commercial se prescrit par deux ans à compter de la conclusion du contrat dont la requalification est recherchée (et pas à compter de la date de conclusion du contrat initial).
Nous avons, par ailleurs, eu l’occasion de présenter récemment les principaux points à retenir concernant BACS (Building Automation and Control Systems) ainsi que les mesures clés de la loi EnR (relative à l’accélération de la production des énergies renouvelables) pour le secteur de l’immobilier.
En droit fiscal, l’actualité fut particulièrement dense, en particulier en matière de TVA.
Tout d’abord, le 5 juillet dernier, le Conseil d’Etat a rendu un avis attendu sur la question du champ de l’exonération de TVA sur les activités de location à usage d’habitation. Le Conseil d’Etat juge les dispositions internes incompatibles avec la directive qu’en tant qu’elles exigent la réunion d’au moins trois prestations de para-hôtellerie et impose à l’administration « d’apprécier au cas par cas si un établissement proposant une location de logements meublés, eu égard aux conditions dans lesquelles cette prestation est offerte, notamment la durée minimale du séjour et les prestations fournies en sus de l’hébergement, se trouve en situation de concurrence potentielle avec les entreprises hôtelières ». En d’autres termes, selon le Conseil d’Etat, le critère de la fourniture de trois des quatre prestations de services n’est pas toujours pertinent pour déterminer si une opération de location meublée est en concurrence avec le secteur hôtelier. A cet égard, il semble que, outre l’étendue des services rendus, il faille apporter une attention particulière à la durée de la location.
Toujours en matière de para-hôtellerie, la Cour administrative d’appel de Nantes a jugé que la location d’un gîte qui comporte de manière potentielle trois des prestations de parahôtellerie ne bénéficie pas de l’exonération de TVA. Au cas particulier, la Cour a jugé que le simple fait de disposer de la possibilité de fournir les petits déjeuners avait pour effet de soumettre la prestation d’hébergement à la TVA, deux autres prestations figurant dans la liste susvisée de l’article 261 D du Code général des impôts étant rendues par ailleurs. La portée de cet arrêt est toutefois incertaine au regard de l’avis du Conseil d’Etat précité.
Une réponse ministérielle du 27 juin a confirmé que le régime de l’assimilation était bien applicable aux marchands de biens (et n’était pas réservé aux promoteurs) et a apporté plusieurs précisions bienvenues. Il est notamment précisé que la TVA d’acquisition (y compris les régularisations de TVA facturées au marchand de biens) est déductible dès que l’assimilation se produit (i.e. après une année de location ou de recherche de locataires). Il n’est donc pas nécessaire d’attendre la revente de l’immeuble soumise à la TVA sur option pour déduire cette TVA d’acquisition, ce qui est une évolution importante par rapport à l’état actuel de la jurisprudence.
Une réponse ministérielle du 4 juillet a par ailleurs confirmé l’applicabilité de la dispense de TVA de l’article 257 bis du CGI :
- lorsqu’un exploitant hôtelier cède à un crédit-bailleur les murs d’un hôtel (soit dans le cadre d’un lease back, soit dans le cadre de la mise en place d’un crédit-bail avec un autre crédit preneur) ; et
- lorsqu’un exploitant hôtelier crédit-preneur d’un immeuble dans lequel il exerce son activité lève l’option d’achat du crédit-bail immobilier pour céder ensuite l’immeuble à un crédit bailleur dans le cadre d’une opération de « lease-back » ou dans le cadre de la mise en place d’un crédit-bail avec un crédit-preneur autre que le cédant.
Enfin, concernant les plus-values immobilières, le Conseil d’État a mis fin à l’affaire SCI Faucon en confirmant l’application du prélèvement de l’article 244 bis A du CGI en cas de vente d’un immeuble par une SCI détenue par un Etat souverain.
En droit de l’urbanisme, le Conseil d’Etat apporte plusieurs clarifications utiles.
Dans une décision publiée au Recueil, les juges du Palais-Royal répondent à quatre questions inédites, dont celle relative à l’opposabilité d’un « cahier de recommandations architecturales », annexé au règlement du PLU ou encore à la légalité de prescriptions d’un permis de construire (PC) subordonnant leur mise en œuvre à un « avis » préalable de la commune, non prévu par les textes.
Le Conseil d’Etat précise l’office du juge des référés saisi d’une demande tendant à ce qu’il soit mis fin aux effets de la suspension d’un PC : les moyens déjà invoqués dans le cadre de l’instance en référé ayant conduit à la suspension demeurent opérants dans le cadre de cette nouvelle instance. En outre, pour apprécier s’il est possible de lever la suspension prononcée, le juge doit tenir compte (i) d’une part, de la portée du PCM sur les vices précédemment relevés et (ii) d’autre part, des vices allégués ou d’ordre public dont le PCM serait lui-même entaché.
En matière de retrait de PC, la Haute juridiction précise également que le principe du contradictoire impose à l’autorité administrative de faire droit aux demandes d’audition formées par leurs titulaires préalablement au retrait, alors même qu’ils auraient déjà présenté des observations écrites.
Le décret du 11 juin 2021, portant application du IV bis de l’article L. 234-1-1 du code du tourisme – qui définit les locaux commerciaux dont la location est susceptible d’être soumise à autorisation – ne s’applique pas aux locaux meublés destinés à l’habitation qui ont fait l’objet d’une procédure d’autorisation préalable de changement d’usage, quelle que soit la destination des immeubles dans lesquels ils sont situés.
Nous souhaitons à nos lecteurs un bel été et aurons le plaisir de les retrouver à la rentrée pour poursuivre notre veille concernant l’actualité juridique et fiscale du secteur immobilier.