Le tribunal administratif de Nîmes a été saisi en 2019 de sept requêtes tendant à l’annulation du permis de construire délivré à la société Argan en vue de la construction d’un centre de tri de colis à Founès, ainsi que d’une requête tendant à l’annulation de l’arrêté préfectoral accordant à cette société une autorisation environnementale.
Par plusieurs jugements en date du 9 novembre 2021, le tribunal administratif a rejeté les requêtes en l’annulation du permis de construire ; le tribunal a en revanche fait droit à la requête en annulation de l’autorisation environnementale.
Pour annuler l’arrêté du préfet du Gard accordant à la société Argan une autorisation environnementale, le tribunal a retenu le moyen tiré de la violation des articles L.411-1 et L.411-2 du code de l’environnement encadrant les conditions de la dérogation à l’interdiction de porter atteinte à la conservation d’espèces protégées. En application de ces dispositions, un projet dont la réalisation serait susceptible de porter atteinte à une espèce protégée ne peut être autorisé à titre dérogatoire que (i) « s’il répond, par sa nature et compte tenu des intérêts économiques et sociaux en jeu […] à une raison impérative d’intérêt public majeur », (ii) « s’il n’existe pas d’autre solution satisfaisante » et (iii) s’il « ne nuit pas au maintien, dans un état de conservation favorable, des populations des espèces concernées dans leur aire de répartition naturelle ».
Le tribunal a estimé qu’en l’espèce, même si le projet de la société Argan aura nécessairement un impact positif sur l’emploi local et des retombées économiques pour les années à venir, ces créations potentielles d’emplois et ces retombées économiques ne suffisent pas à caractériser une raison impérative d’intérêt public majeur, même dans un secteur où le taux de chômage apparaît supérieur à la moyenne nationale.
Le jugement relève également que « La seule circonstance invoquée en défense que le positionnement stratégique du centre de tri de colis au barycentre de sa zone de chalandise de la société Amazon aurait nécessairement un impact carbone national favorable n’est pas de nature à pallier l’insuffisance de l’intérêt public majeur qui s’attache à ce projet, alors au demeurant que l’empreinte carbone sera tout aussi nécessairement supérieure au niveau local ».
Enfin, le tribunal a considéré qu’il ne résultait pas de l’instruction qu’aucune alternative satisfaisante à ce projet n’existait.
Ces moyens n’étant pas susceptibles d’être régularisés, le tribunal a annulé l’autorisation environnementale faisant ainsi également obstacle à la mise en œuvre du permis de construire (articles L.425-14 et L.425-15 du code de l’environnement).
Une analyse très en amont du dépôt du dossier et à l’aune de la jurisprudence la plus récente en matière de dérogation à l’interdiction de porter aux espèces protégées permet de définir les conditions dans lesquelles une telle dérogation peut être obtenue et la façon dont le dossier de demande doit être présenté.
TA de Nîmes, 9 nov. 2021, req. n°2002478 ; TA de Nîmes, 9 nov. 2021, req. n°2001001, 2001003, 2001005, 2001006, 2001007, 2001008, 2001009