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15 mars 2024

L’utilisation des sols non conforme au PLU est constitutive d’une infraction pénale pouvant aboutir à mettre en conformité les lieux ou les ouvrages

La chambre criminelle de la Cour de cassation a rendu deux importantes décisions à publier au Bulletin en matière de contentieux pénal de l’urbanisme, précisant que :

  • l’affectation à une utilisation contraire aux dispositions du PLU des constructions régulièrement édifiées constitue une violation de ce plan et le délit prévu à l’article L. 610-1 du code de l’urbanisme ;
  • cette utilisation non conforme peut donner lieu au prononcé d’une mesure à caractère réel, tendant à la mise en conformité des lieux ou des ouvrages.

Dans la première affaire, des particuliers avaient acquis des locaux situés dans un ancien site industriel, en vue d’y développer une activité artisanale.

Toutefois, le règlement du PLU interdit dans cette zone  les constructions à usage artisanal, ce qui a conduit  la commune à dresser des procès-verbaux d’infraction.

La Cour d’appel de Nancy a débouté la commune après relaxe des propriétaires des immeubles, en considérant que, selon le PLU, ce sont les seules constructions à usage artisanal ou industriel qui sont interdites, et non toute activité artisanale ou industrielle. A défaut d’une quelconque construction à usage artisanal, l’infraction aux dispositions du PLU n’était selon elle pas constituée.

La Cour de cassation censure ce raisonnement et juge, sur le fondement des articles L. 151-9, L. 480-4 et L. 610-1 du code de l’urbanisme, que « le fait d’affecter à une utilisation contraire aux dispositions du [PLU] des constructions régulièrement édifiées en vue d’une autre affectation constitue une violation de ce plan et le délit prévu à l’article L. 610-1 du code de l’urbanisme ».

En d’autres termes, quand bien même les constructions avaient été régulièrement édifiées, leur affectation ultérieure à une utilisation contraire aux dispositions du PLU est constitutive d’une infraction réprimée par l’article L. 610-1 du code de l’urbanisme.

Dans la seconde affaire, un permis de construire avait été délivré en 2011 et modifié en 2012 pour autoriser l’extension d’un bâtiment d’ostréiculture.

Alors que le PLU applicable autorise dans la zone considérée les seules « constructions ou installations nécessaires aux services publics ou à des activités économiques exigeant la proximité immédiate de l’eau […], le changement de destination des bâtiments existants n’étant autorisé que s’ils sont nécessaires à un intérêt général lié à la mer et aux activités de la mer », le bâtiment principal initialement dédié au stockage et au conditionnement des crustacés est devenu, au rez-de-chaussée, une poissonnerie et, à l’étage, un restaurant.

Ces nouvelles affectations caractérisent, selon la Cour d’appel de Rennes approuvée par la Cour de cassation, un changement de destination non conforme aux prescriptions du PLU. En effet, la dégustation de produits aquacoles issus de l’exploitation est devenue une activité commerciale de restauration.

La Cour d’appel relève à ce titre que :

  • il est proposé à la clientèle « des produits comprenant un apport substantiel de denrées alimentaires d’une provenance extérieure à sa production» ;
  • les « prestations de restauration, compte tenu de l’importance des moyens qui leur a été consacrée et des achats dépourvus de tout lien avec l’activité de production ostréicole qu’elles ont nécessité, et leur prédominance sur cette dernière d’un point de vue économique », ne constituent pas un prolongement ni un accessoire de cette dernière activité.

Surtout, la Cour de cassation juge que « les infractions aux dispositions des [PLU] peuvent donner lieu à mise en conformité des lieux ou des ouvrages, la seule circonstance que l’infraction porte sur l’utilisation de bâtiments de manière non conforme à celle autorisée par le PLU ne faisant pas obstacle à ce qu’une telle mesure à caractère réel soit prononcée ».

Il s’ensuit que c’est à bon droit que la Cour d’appel a ordonné notamment la remise en état des lieux, dans un délai d’un an.

En particulier, alors que les bénéficiaires des travaux considéraient que la Cour d’appel n’était pas saisie du fait de travaux réalisés en méconnaissance des permis de construire et ne pouvait donc ordonner la mise en conformité des lieux auxdits permis, la Cour de cassation approuve au contraire les juges d’appel « dès lors que ces permis de construire, dont les préconisations n’ont pas été respectées, avaient été délivrés en application de ce document de planification et sur le fondement de l’activité d’ostréiculteur du demandeur ».

Cass. Crim. 27 février 2024, n° 23-82.639

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