A la suite de l’avis rendu par le Conseil d’Etat le 5 juillet 2023 déclarant le régime TVA français de location meublée non-conforme à la Directive TVA, le législateur a entrepris de remodeler les règles applicables en la matière dans le cadre de la loi de finances pour 2024. Depuis le 1er janvier 2024, l’article 261 D, 4° du CGI soumet ainsi de plein droit à la TVA :
- les prestations d’hébergement fournies dans le cadre du secteur hôtelier ou de secteurs ayant une fonction similaire offertes au client pour une durée n’excédant pas 30 nuitées et comprenant la mise à disposition d’un local meublé et au moins 3 des prestations suivantes : le petit-déjeuner, le nettoyage régulier des locaux, la fourniture de linge de maison et la réception, même non personnalisée, de la clientèle ; et,
- les locations de logements meublés à usage résidentiel dans le cadre de secteurs autres que ceux mentionnés au tiret précédent lorsqu’elles sont accompagnées de 3 des 4 prestations susvisées.
Cet aménagement « cosmétique » consistant à distinguer formellement deux catégories d’activités de parahôtellerie et destiné à rendre le texte de droit interne formellement conforme à la Directive (nous vous invitons à consulter notre précédente brève sur le sujet) laissait présager une modification par l’administration de sa doctrine sur la parahôtellerie, restée inchangée depuis 2012. La mise à jour du BOI-TVA-CHAMP-10-10-50-20 intervenue le 7 août dernier devrait a priori rassurer la plupart des acteurs du marché.
Précisions concernant les deux types d’activités de parahôtellerie
Les nouveaux commentaires administratifs intègrent la distinction entre les deux catégories d’activité de parahôtellerie en précisant leurs contours :
- d’une part, les prestations d’hébergement fournies dans le cadre du secteur hôtelier ou assimilé offertes pour de courtes durées (i.e., n’excédant pas 30 nuitées même si le client peut opter pour une durée plus longue). Il est précisé que le secteur hôtelier ou assimilé est notamment susceptible d’englober des structures diverses, tels que les hôtels, villages et maisons familiales de vacances, résidences de tourisme, terrains de camping, chambres d’hôtes, maisons ou appartements meublés et résidences hôtelières à vocation sociale (Ibid., n° 20) ; et,
- d’autre part, les locations meublées à usage résidentiel réalisées dans le cadre de séjours supérieurs à 30 jours. Pour ces locations l’administration précise qu’il s’agit des locations ayant vocation à une occupation présentant un certain degré de permanence, caractérisée par la signature d’un contrat de location dans les conditions prévues par la loi n° 89-462 du 6 juillet 1989 ou d’un bail non soumis à cette loi mais régissant les relations entre les parties dans des conditions similaires, dont la durée excède nécessairement 1 mois (Ibid., n° 110). Il n’est toutefois pas nécessaire que le locataire fasse du logement sa résidence principale. Le secteur résidentiel est notamment susceptible de concerner les résidences services, résidences étudiantes, résidences seniors, maisons de retraite et l’habitat partagé (co-living) (Ibid., n° 130).
Cette distinction entre deux catégories d’activités de parahôtellerie ne semble pas avoir cependant d’incidence significative sur les conditions d’application de la TVA.
Nouveaux commentaires sur les critères d’application de la TVA
Eléments sans incidence sur l’application de la TVA
L’administration rappelle qu’un certain nombre de circonstances n’ont pas d’incidence sur la soumission ou non à la TVA de la location :
- la qualité du bailleur et notamment la circonstance qu’il fasse ou non l’objet d’un classement ou d’une immatriculation au registre du commerce et des sociétés (Ibid., n° 20) ;
- le fait que le logement soit situé ou non dans un secteur touristique ou que l’hébergement s’opère dans un immeuble collectif ou une construction individuelle (villas, chalets, cottages, etc) (Ibid., n° 50).
Précision concernant les modalités de réalisation des prestations de service annexes
Dans tous les cas, la soumission à la TVA demeure conditionnée à la fourniture d’au moins 3 des 4 prestations parmi la fourniture du petit-déjeuner, le nettoyage régulier des locaux, la fourniture de linge de maison et la réception de la clientèle.
Les commentaires reprennent un certain nombre de précisions générales :
- Comme c’était le cas auparavant, le bailleur peut recourir à des tiers, agissant en son nom et pour son compte à l’égard des clients, pour fournir ces prestations, mais doit néanmoins supporter personnellement la responsabilité vis-à-vis des clients et en assumer tous les risques (Ibid., n° 30).
- En outre, la circonstance que ces services soient inclus dans le prix du séjour, sans possibilité de renonciation, ou qu’ils soient optionnels et facturés séparément est indifférente. En revanche, ils doivent être effectivement proposés au client, ce qui doit pouvoir être démontré, par exemple, au moyen d’un affichage dans les locaux, de la mise à disposition d’un livret d’accueil, d’échanges écrits avec le client ou d’une mention sur le site internet du prestataire d’hébergement (Ibid.).
En revanche, les commentaires apportent des précisions sur des questions concrètes concernant chacun des services :
- S’agissant du petit-déjeuner: le prestataire peut prévoir un délai entre la commande ou la réservation du petit-déjeuner (y compris, par exemple, dans une boulangerie à proximité) et sa fourniture effective, sans toutefois que ce délai ne prive de toute portée la possibilité offerte. Cependant, la simple mise à disposition, dans les locaux destinés à l’hébergement, d’un distributeur alimentaire et/ou de boissons n’est pas jugée suffisante (Ibid., n° 70).
- Le nettoyage des locaux est caractérisé dès lors qu’il est effectué avant le début du séjour et qu’il est proposé au client de façon régulière pendant son séjour, ce qui est apprécié en fonction notamment de la durée du séjour. Un nettoyage hebdomadaire des locaux est considéré comme suffisant et, lorsque la durée du séjour est inférieure à une semaine, la condition est satisfaite lorsque le nettoyage est au moins effectué avant le début du séjour (Ibid., n° 80). Le prestataire peut prévoir un délai entre la demande de nettoyage et sa fourniture effective sans toutefois que ce délai ne prive de toute portée la possibilité offerte. La simple mise à disposition du client du matériel servant au nettoyage est, en revanche, jugée insuffisante (Ibid.).
- La fourniture du linge de maison est caractérisée dès lors qu’elle est effectuée au début du séjour et que son renouvellement régulier, apprécié en fonction de la durée du séjour du client, est proposé par le prestataire. Une proposition de renouvellement hebdomadaire est considérée comme suffisante et, lorsque la durée du séjour est inférieure à une semaine, la condition est satisfaite lorsque le linge de maison est au moins renouvelé au début du séjour (Ibid., n° 90). La simple mise à disposition d’une laverie, sans renouvellement du linge de maison est, en revanche, insuffisante (Ibid.).
- La réception de la clientèle permet l’accueil, l’orientation des clients vers leur logement et leur information sur les modalités d’accès aux éventuels équipements et services annexes disponibles, ainsi que sur les règles de fonctionnement de l’établissement. Elle peut notamment être assurée par l’intermédiaire d’un dispositif de communication électronique, avec mise à disposition des clés via une boîte à clés, et il n’est pas exigé qu’elle soit offerte de manière permanente (Ibid., n° 100).
NB : l’acceptation d’un accueil par l’intermédiaire d’un dispositif de communication électronique accompagné d’une remise des clés via une boîte à clés. On peut penser que certains loueurs de location de courte durée via des plateformes telles que Airbnb pourraient tomber dans le champ de la TVA (sauf application de la franchise en base) dès lors que le critère de l’accueil serait ainsi satisfait (et qu’il leur serait difficile de ne pas fournir linge de maison ou un ménage à l’entrée dans les locaux)
Un élément notable à notre avis est que s’agissant des services autres que le petit-déjeuner, il ne semble plus suffisant que le prestataire d’hébergement dispose simplement des moyens nécessaires permettant d’assurer la fourniture de ces services à l’ensemble des clients hébergés comme c’était le cas auparavant. Cette faculté de ne disposer que des moyens nécessaires qui figure toujours au n° 60 du nouveau BOFiP n’est en effet apportée que sous réserve des précisions décrites ci-dessus pour la réception de la clientèle, du nettoyage des locaux et de la fourniture de linge maison.
Portée pratique des nouveaux commentaires administratifs ?
Ces précisions techniques viennent de manière bienvenue mettre un terme à des interrogations très concrètes, et vont donc dans le sens d’une plus grande sécurité juridique, sans remise en cause majeure des pratiques existantes. Il semble néanmoins important que les acteurs de la parahôtellerie réexaminent leur pratique au regard de ces nouvelles précisions afin d’apporter, si nécessaire, les aménagements pertinents.
A noter que l’administration fiscale a également réorganisé le plan de ses commentaires relatifs aux taux de TVA applicables aux opérations d’hébergement et locations de logements (BOI-TVA-LIQ-30-20-10-10 ; BOI-TVA-LIQ-30-20-10-30).