La Cour d’appel de Paris vient de rendre une nouvelle décision dans l’affaire Lupa en matière de taxe de 3 % après que son premier arrêt ait été cassé par la Cour de cassation (voir Cour de cassation, 4 novembre 2020, n° 18-11.771 : la Cour avait considéré que la société Lupa ne pouvait plus bénéficier de son droit à l’erreur).
Pour rappel, la société anonyme de droit luxembourgeois Lupa détenait indirectement plusieurs immeubles en France par l’intermédiaire de neuf sociétés anonymes de droit luxembourgeois qui détenaient elles-mêmes 100 % du capital social de neuf SCI françaises propriétaires des immeubles.
Le 6 septembre 2005, l’administration fiscale avait notifié à la société Lupa une proposition de rectification en matière de taxe de 3 % au motif qu’elle n’avait pas déposé dans les délais la déclaration n° 2746 lui permettant de s’exonérer de cette taxe. En revanche, aucune des sociétés interposées n’avait fait l’objet d’un redressement de taxe de 3 % pour son propre compte ou au titre de la solidarité avec la société Lupa (art. 990 F du CGI) alors même qu’elles n’avaient pas non plus déposé de déclarations n° 2746.
Reprenant la jurisprudence de la Cour de cassation en matière de droits d’enregistrement (voir notamment Cour de cassation, 18 novembre 2008, n° 07-19.762), la Cour d’appel considère que si l’administration fiscale peut choisir de notifier une proposition de rectification à l’un seulement des redevables solidaires d’une dette fiscale, la procédure ensuite suivie doit être contradictoire et la loyauté des débats l’oblige à notifier les actes de celle-ci à tous les redevables, y compris pendant la phase contentieuse.
En l’espèce, la Cour d’appel a jugé que la procédure était irrégulière dans la mesure où :
- la proposition de rectification avait été uniquement notifiée à la société Lupa et aucun des actes ultérieures de la procédure de rectification (réponse aux observations du contribuable, décision expresse de rejet, avis de mise en recouvrement, ) n’avaient été notifiés aux sociétés interposées, solidairement responsables du paiement de la taxe de 3 % (et cela alors même que l’administration n’a pas mis en œuvre la solidarité au cas particulier) ;
- l’administration fiscale avait connaissance de l’existence et de l’identité de chacune des neufs sociétés civiles immobilières française interposées et connaissait également, ou pouvait connaître, chacune des neufs sociétés anonymes de droit luxembourgeois interposées (ces sociétés ayant déposé une déclaration n° 2065 au titre de l’impôt sur les sociétés).
Il convient toutefois de relever que, dans les décisions de jurisprudence en matière de droits d’enregistrement, la procédure avait été considérée irrégulière par les juges car l’administration fiscale avait notifié les actes de procédure à l’un des débiteurs solidaires tout en poursuivant le recouvrement sur un autre débiteur solidaire auquel les actes de procédure n’avaient pas été notifiés.
La situation était ainsi différente de la présente affaire où la solidarité n’avait pas été mise en œuvre par l’administration fiscale à l’égard des sociétés interposées. La solution méritera donc d’être confirmée par la Cour de cassation. En tout état de cause, il s’agit d’un moyen qu’il convient de soulever dans les procédures en cours.