Par deux décisions, la Cour de cassation a renvoyé au Conseil constitutionnel une QPC portant sur l’article L. 322-2 du code de l’expropriation pour cause d’utilité publique, qui détermine les modalités d’évaluation devant le juge de l’indemnité d’expropriation.
Ce texte précise que les biens expropriés sont estimés à la date de la décision de première instance, mais il prévoit également que, sous réserve de certains cas, est seul pris en considération l’usage effectif des immeubles et droits réels immobiliers à une date de référence antérieure :
– un an avant l’ouverture de l’enquête publique relative à l’utilité publique de l’expropriation ; ou
– en l’absence d’enquête publique, un an avant la déclaration d’utilité publique ; ou
– au jour de la mise à disposition du public du dossier pour les projets ou programmes soumis à débat public ;
– lorsque le bien est situé à l’intérieur du périmètre d’une ZAC, à la date de publication de l’acte créant la zone, si elle est antérieure d’au moins un an à la date d’ouverture de l’enquête publique préalable à la déclaration d’utilité publique.
L’article L. 322-2 du code de l’expropriation exclut également la prise en compte « des changements de valeur subis depuis cette date de référence, s’ils ont été provoqués par l’annonce des travaux ou opérations dont la déclaration d’utilité publique est demandée, par la perspective de modifications des règles d’utilisation des sols ou par la réalisation dans les trois années précédant l’enquête publique de travaux publics dans l’agglomération où est situé l’immeuble » pour déterminer l’indemnité judiciaire d’expropriation.
Les auteurs de la QPC soutenaient que ces dispositions méconnaissent l’article 17 de la Déclaration des droits de l’homme et du citoyen imposant, en cas d’expropriation, le versement d’une indemnité couvrant l’intégralité du préjudice direct, matériel et certain, causé par l’expropriation.
Selon eux, elles ne permettent en effet pas d’accorder une juste et intégrale indemnité, notamment en écartant la prise en compte du prix auquel l’expropriant entend revendre le bien dans des conditions déjà connues en cas d’« expropriation pour revente ».
Pour rejeter la QPC, le Conseil constitutionnel retient que les dispositions légales contestées poursuivent un objectif d’intérêt général: éviter que la réalisation d’un projet d’utilité publique ne soit compromise par une hausse de la valeur vénale du bien exproprié résultant de l’annonce du projet au détriment du bon usage des deniers publics.
Il constate ensuite que le juge de l’expropriation peut prendre en compte les changements de valeur subis par le bien exproprié depuis la date de référence s’ils sont extérieurs à l’annonce du projet.
Le Conseil constitutionnel déclare ainsi conformes à la constitution les dispositions de l’article L. 322-2 du code de l’expropriation pour cause d’utilité publique.