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13 mars 2024

Végétalisation et photovoltaïque : fixation des seuils d’exonération pour conditions économiques inacceptables des parcs de stationnement

Le dernier texte d’application des obligations d’installation d’énergies renouvelables (« ENR ») issues de la loi Climat et résilience [1] a été publié le 6 mars 2024. L’arrêté du 5 mars 2024 [2] précise les modalités d’application de l’exception tirée des conditions économiques inacceptables s’agissant des parcs de stationnement [3].

Le calendrier des mesures d’application de la loi AER[4] qui fixe de nouvelles obligations d’installation d’ENR est, quant à lui, encore incertain.

  1. Des précisions sur les conditions économiques raisonnables applicables aux parkings

Pour rappel, les articles L. 171-4 du code de la construction et de l’habitation (CCH) et L. 111-19-1 du code de l’urbanisme, complétés par le décret n° 2023-1208 du 18 décembre dernier codifié aux articles R. 111-25-1 et suivants du code de l’urbanisme, visent la construction ou la rénovation lourde des (i) parcs de stationnement extérieurs de plus de 500 m² associés aux bâtiments ou parties de bâtiments soumis à l’article L. 171-4 du CCH ou (ii) des nouveaux parcs de stationnement de plus de 500 m² ouverts au public.

Ces parcs doivent installer :

  • sur au moins 50% de leur surface (i) des dispositifs végétalisés ou (ii) des ombrières comportant des procédés de production d’ENR ; et
  • sur au moins 50% de leur surface (i) des revêtements de surface, (ii) des aménagements hydrauliques ou (iii) des dispositifs végétalisés favorisant la perméabilité et l’infiltration des eaux pluviales ou leur évaporation.

Sont concernées les demandes d’autorisation d’urbanisme déposées à compter du 1er janvier 2024 ou la conclusion ou le renouvellement d’un contrat de service public, de prestation de service ou de bail commercial à partir de cette date.

Plusieurs exceptions sont prévues par l’article L. 111-19-1 et précisées aux articles R. 111-25-1 et suivants  du code de l’urbanisme, parmi lesquelles celle relative aux conditions économiques inacceptables.

En premier lieu, le parc de stationnement est exonéré de l’obligation d’installer des ENR lorsque les contraintes techniques ou l’ensoleillement insuffisant engendrent des coûts d’investissement portant atteinte de manière significative à la rentabilité.

En pratique, l’atteinte est considérée comme significative si le coût actualisé de l’énergie produite par cette installation sur une durée de vingt ans excède de plus de 1,2 fois la valeur du tarif d’achat ou du tarif de référence utilisé pour le calcul des revenus pouvant être obtenus par la vente de l’électricité produite par l’installation [5]. Le calcul du coût actualisé tient compte d’un taux d’actualisation de 3% (article 2).

En deuxième lieu, les obligations d’installation des dispositifs d’ombrage (ENR et végétalisation [6]) ne sont pas applicables si le coût des travaux hors taxe compromet la viabilité économique du propriétaire du parc [7]. L’arrêté fixe les seuils au-delà desquels ce coût est excessif (article 1er).

Pour les ombrières photovoltaïques, l’exonération joue si le coût des travaux d’installation des ombrières est en lui-même excessif [8]. Selon l’arrêté, le seuil au-delà duquel le coût des travaux d’installation de tels dispositifs est considéré comme excessif est de :

  • 15% du coût total de création ou de rénovation d’un parc n’incluant pas la mise en œuvre de l’obligation, pour les parcs créés ou lourdement rénovés ;
  • 10% de la valeur vénale du parc au jour de la demande d’exonération si les travaux ont pour seul objectif de satisfaire à l’obligation l’occasion de la conclusion du nouveau contrat ou du contrat de renouvellement, pour les parcs existants.

Le coût des travaux liés à l’installation de ces ombrières est alors diminué des revenus actualisés pouvant être obtenus par la vente de l’électricité produite durant vingt ans. L’arrêté [9] précise que ces revenus sont déterminés sur la base des dispositifs de soutien à la production d’énergie photovoltaïque que sont l’obligation d’achat et le complément de rémunération soit au titre de l’article L. 314-1 du code de l’énergie soit via une procédure de mise en concurrence lancée au titre de l’article L. 311-10 du code de l’énergie, lorsque la technologie, le mode d’implantation et la puissance de l’installation sont compatibles avec un tel soutien.

Le calcul des revenus actualisés tient alors compte d’un taux d’actualisation fixé à 3 %.

Pour les dispositifs végétalisés, l’exonération ne vaut que si le coût des travaux est excessif car renchéri par une contrainte technique [10]. Selon l’arrêté, le seuil au-delà duquel le coût des travaux d’installation de tels dispositifs est considéré comme excessif est de :

  • 15% du coût total de création ou de rénovation d’un parc incluant la mise en œuvre de l’obligation hors contrainte technique particulière pour les parcs créés ou lourdement rénovés ;
  • 10 % de la valeur vénale du parc au jour de la demande d’exonération si les travaux ont pour seul objectif de satisfaire à l’obligation à l’occasion de la conclusion du nouveau contrat ou du contrat de renouvellement pour les parcs existants.

Rappelons également que, lorsque le tiers-investisseur supporte le coût des travaux, le coût des travaux liés à l’installation des ombrières correspond au reste à charge éventuellement demandé par le tiers-investisseur au propriétaire [11].

Enfin, pour les dispositifs d’infiltration, l’exonération fonctionne à la fois si le coût des travaux liés au respect de l’obligation compromet en soi la viabilité économique du propriétaire du parc mais également lorsque ce coût renchéri d’une contrainte technique, s’avère excessif [12]. Selon l’arrêté, le seuil au-delà duquel le coût des travaux d’installation de tels dispositifs est considéré comme excessif est de :

  • 15% du coût total de création ou de rénovation d’un parc incluant la mise en œuvre de l’obligation, pour les parcs créés ou lourdement rénovés ;
  • 10% de la valeur vénale du parc au jour de la demande d’exonération si les travaux ont pour seul objectif de satisfaire à l’obligation à l’occasion de la conclusion du nouveau contrat ou du contrat de renouvellement, pour les parcs existants.

Rappelons également que, pour les parcs existants, les exceptions liées aux surcoûts « s’apprécient en prenant en compte les coûts engendrés par l’ensemble des obligations » c’est-à-dire l’implantation d’ENR, la végétalisation, mais aussi l’installation de dispositifs d’infiltration [13].

Enfin, l’arrêté précise que l’étude technico-économique fournie au soutien du bénéfice de l’exception liée aux conditions économiques raisonnables dans le cas d’une installation photovoltaïque doit être réalisée par une entreprise disposant (i) d’une qualification ou d’une certification professionnelle conforme aux exigences du dispositif de soutien auquel l’installation est éligible ou (ii) d’un signe de qualité délivré par un organisme ayant signé la charte RGE Etudes de l’ADEME. Cette attestation est fournie dans le cadre de la demande d’autorisation d’urbanisme ou, en l’absence d’autorisation, lors du contrôle (article 3).

  1. Point d’étape des textes d’application de la loi AER

Si le cadre juridique des obligations issues de la loi Climat et résilience est désormais complet, reste à connaître les textes d’application des articles 40 et 43 de la loi AER qui fixent respectivement des obligations de solarisation (i) pour les parcs de stationnement d’une superficie supérieure à 1.500 m² existants, et (ii) les bâtiments existants.

Le rapport d’information sur l’application de la loi AER, enregistré à la Présidence de l’Assemblée nationale le 13 février 2024, annonce finalement pour l’article 40 une publication dans le courant de l’année 2024 dès lors que « les futurs obligés doivent anticiper ces échéances, notamment en termes de commandes des panneaux solaires. Il n’en reste pas moins que les services ministériels disposent encore d’un peu de temps pour finaliser leurs textes ».

S’agissant de l’article 43, aucune date n’est annoncée mais « des réflexions sont en cours afin de pouvoir publier les textes d’application suffisamment en amont de l’entrée en vigueur de l’obligation » [14].

Enfin, une proposition de loi a été déposée le 5 mars 2024 pour simplifier l’installation des panneaux photovoltaïques en proposant de leur faire bénéficier du même régime que les antennes téléphoniques au titre de l’article L. 632-2-1 dans le code du patrimoine pour lesquelles, en cas de silence de l’architecte des Bâtiments de France, son avis est réputé favorable [15]. Si cette mesure pourrait permettre d’accélérer à la marge l’installation des projets photovoltaïques, son articulation avec l’exception relative aux contraintes architecturales et patrimoniales pose question.

Arrêté du 5 mars 2024 portant application du décret n° 2023-1208 du 18 décembre 2023 portant application de l’article L. 171-4 du code de la construction et de l’habitation et de l’article L. 111-19-1 du code de l’urbanisme régissant les parcs de stationnement

Voir également notre analyse du décret du 18 décembre 2023 et des arrêtés du 19 décembre2023  sous ce lien

 

[1] Loi n° 2021-1104 du 22 août 2021 portant lutte contre le dérèglement climatique et renforcement de la résilience face à ses effets.

[2] Arrêté du 5 mars 2024 portant application du décret n° 2023-1208 du 18 décembre 2023 portant application de l’article L. 171-4 du code de la construction et de l’habitation et de l’article L. 111-19-1 du code de l’urbanisme régissant les parcs de stationnement.

[3] Pour les bâtiments, ces conditions avaient d’ores et déjà été fixées dans un arrêté du 19 décembre 2023 portant application de l’article L. 171-4 du code de la construction et de l’habitation, fixant la proportion de la toiture du bâtiment couverte par un système de végétalisation ou de production d’énergies renouvelables, et précisant les conditions économiquement acceptables liées à l’installation de ces systèmes ;

[4] Loi n° 2023-175 du 10 mars 2023 portant accélération de la production d’énergies renouvelables

[5] Article R. 111-25-11 du code de l’urbanisme.

[6] Article R. 111-25-13 du code de l’urbanisme.

[7] Article R. 111-25-12 du code de l’urbanisme.

[8] Article R. 111-25-14 du code de l’urbanisme.

[9] L’arrêté fait référence à l’article R. 111-25-11 du code de l’urbanisme sur ce point mais vise également probablement l’article R. 111-25-14.

[10] Article R. 111-25-13 du code de l‘urbanisme.

[11] Article R. 111-25-14 du code de l’urbanisme

[12] Article R. 111-25-6 du code de l’urbanisme.

[13] Article R. 111-25-18 du code de l’urbanisme.

[14] Rapport d’information déposé en application de l’article 145-7 alinéa 1 du règlement, par la commission des affaires économiques sur l’application de la loi n° 2023-175 du 10 mars 2023 relative à l’accélération de la production d’énergies renouvelables (M. Henri Alfandari, M. Éric Bothorel, M. Maxime Laisney et M. Nicolas Meizonnet)

[15] Proposition de loi n°2290 visant à simplifier l’installation de panneaux solaires sur les toitures et ombrières, déposée le 05/03/2024

* Le décret est pris pour l’application de l’article 57 de la loi n°2020-1525 du 7 décembre 2020 d’accélération et de simplification de l’action publique, dite loi ASAP, qui a modifié certains aspects de la procédure de cessation d’activité d’une installation classée pour la protection de l’environnement (ICPE). * Il crée une procédure de réhabilitation […]

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